
L’Avent est-il un temps de pénitence ?
Pour la plupart des catholiques d’aujourd’hui, la réponse serait : non. Car nous ne nous souvenons plus de ce qu’ont pu être, par le passé, les observances pénitentielles qui accompagnaient le temps de l’Avent, – moins marquées, il est vrai, que celle du Carême, mais réelles malgré tout, avec des abstinences de nourriture et de divertissements, alors que nous, nous anticipons sans vergogne la fête avec des goûters, des arbres de Noël, des débauches de lumière et de consommation etc… Nous pourrions être tentés de regarder du côté de nos frères orthodoxes qui affichent sans hésiter un « petit carême » précédant Noël et, chez eux, on sait bien que le jeûne n’est pas une plaisanterie.
Mais l’Avent des catholiques latins a depuis toujours un sens un peu différent, ce n’est pas seulement la préparation pénitentielle à Noël : nous nous préparons surtout au retour glorieux du Christ ! Il est indispensable qu’un événement aussi important que la Parousie ait sa place dans notre calendrier liturgique et elle l’a vraiment avec l’Avent, tout tissé de références aux prophètes et éclairé par le discours « eschatologique » de Jésus (cette année, chez saint Luc, au ch. 21).
A vrai dire, les deux perspectives vont se mêler : la naissance de Jésus, sa présence dans l’histoire des hommes, est déjà l’ouverture des cieux. Par sa seule venue, il remet en cause l’ordre ancien et amorce le nouveau : les pauvres ont leur place dans le Royaume, Dieu est venu chez les hommes, même s’il reste caché. Mais, en retour, l’annonce des derniers temps nous dit le sérieux de la fête de Noël. Ce n’est pas la gentille évocation d’une visite sympathique. Le poupon de la crèche est en même temps le grand Roi qui va juger le ciel et la terre. La liturgie en porte la trace avec les ornements violets du célébrant et l’absence (théorique) de l’orgue pendant le temps de l’Avent.
Quoi qu’il en soit, il faut nous préparer, parce que nous ne sommes pas immédiatement ajustés à la fête qui arrive. Encore une fois, l’Avent est tout en demi-teinte, sa grâce est subtile. Si le Gloria nous a été enlevé, nous gardons l’alléluia qui accompagne la joyeuse nouvelle de son retour imminent. S’il s’agit de se priver, ce n’est pas seulement pour terrasser le vieil homme qui sommeille en nous, c’est plutôt pour faire de la place, afin que Jésus puisse s’installer. Pour cela, poussons les meubles et rangeons le désordre, pour lui faire un accueil sympathique.
Aplanissons devant lui le chemin, « préparez le chemin du Seigneur car il vient ». Comme les juifs, nous attendons le Messie cette année encore. Nous nous mettons en situation de l’accueillir dans nos cœurs, c’est pourquoi il faut savoir faire silence.

