
Nous ferons chez lui notre demeure
Jésus nous dit dans l’évangile de ce 6e dimanche de Pâques. : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons vers lui et, chez lui, nous nous ferons une demeure ». Juste après, la perspective semble se modifier et on nous parle d’un départ que comblera la venue de l’Esprit Saint : « l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit ». Et les questions nous viennent en pagaille: l’Esprit est-il là pour remplacer le Christ et habiter nos âmes quand le Seigneur sera parti et remonté aux cieux ? Ne peut-on pas avoir en même temps le Père, le Fils et le Saint Esprit ? Que valent les promesses du Seigneur nous disant : « je suis avec vous tous les jours jusqu’à la consommation des temps » (Matthieu 28,20), s’il est vraiment parti.
Attention ! Quand nous parlons de « présence », nous pensons surtout à la présence physique que peuvent avoir avec nous des êtres chers. C’est cette présence que Jésus a eue avec certains quand, s’étant fait homme, il a partagé leur vie, comme avec Marie et Joseph et plus tard les apôtres. Il a connu cette vie fraternelle au bord du Lac, partageant la vie de ces hommes, leurs peines et leurs joies. Après sa résurrection, il a prolongé pendant quelque temps cette proximité, en l’offrant par moments à Marie-Madeleine, à Pierre et aux autres, comme l’apprentissage d’une autre mode de présence qui allait commencer avec l’Ascension : à partir de là, il habite leur cœur et leur intelligence, et par moment il les éclaire et même se manifeste à eux de façon fugitive, mais surtout il est là devant eux sur le chemin qu’ils auront à suivre, à leur montrer la route. Cette même présence peut aussi se dire de l’Esprit Saint, mais c’est encore d’une autre façon : l’Esprit saint ne s’enferme pas dans un lieu, toutes les images qu’on utilise à son propos sont fluides : il est plus intérieur à nous-mêmes que nous-mêmes, il est le grand discret qui agit au fond de nos cœurs. Mais, quand on l’invoque, il est là et on devine son passage, il survolte notre intelligence et fortifie notre volonté.
Au croisement de ces différentes « présences », il y a, bien sûr, la présence eucharistique qui est à la foi charnelle et spirituelle. Là c’est lui, Jésus, en chair et en os, mais tout ce que nous voyons de lui est là pour nous déconcerter et nous acheminer, dans la foi, jusqu’à la reconnaissance de sa présence cachée : il n’est ni léger comme l’hostie, ni rond, ni blanc, et pourtant IL EST là !
Accueillons-Le donc avec cette même foi, sachons Le reconnaître dans toutes les approches qu’il se réserve pour nous atteindre. Accueillons-le dans la proximité des visages lavés par les larmes, dans la fragilité des corps souffrants, dans la beauté de la liturgie, dans l’éclat de sa Parole… jusqu’à son Retour !